lundi 8 septembre 2008

"THERE ARE TWO COLOURS IN MY HEAD..."


Acte IV.

De nouveau les yeux qui s’ouvrent trop tôt et la tente qui baigne dans la lumière. Les affaires pour la douche, l’immense tente militaire sur le chemin, et le frigo même pas mini. Les 2€50 dans la poche et la longue file d’attente, ponctuée de serviettes multicolores. Des dizaines de minutes plus tard, les pieds sur le sol humide, et le verrou fermé derrière moi. Le rideau de plastique, le mince filet d’eau glacée, et la galère pour se rincer les cheveux. Juste à côté, la foule pressée devant les robinets anthracite, brosses à dent dans la bouche. Le petit déjeuner qui suit, un bol de plastique et sa petite cuillère blanche, une petite brique de lait, et des céréales au miel.
Préparer le sac de la journée. Les madeleines devenues miettes. Les piles qui défilent dans l’appareil photo. La crème solaire sur nos peaux. Un bonjour à Popol & co au passage.

[...]

Le sourire de Mr Toyota. Nos jus de fruit et une pomme à croquer. Le bar à oxygène et ses différentes senteurs, esprits fleuris, fruités ou océaniques. Le premier concert suivi de là-haut, comme une habitude qui s’installe. The Whigs. A droite et à gauche de la scène, les longs tubes néons suspendus, pré-décor impressionnant en attendant le concert mythique du soir. Une petite pause dans l’herbe pour les dernières chansons.

Et puis nos places au second rang, les mains sur la barrière, tout près de la scène. Gossip. Beth et sa robe sombre constellée de couleurs. Ses cheveux raides et noirs, et sa voix unique qui perce la peau. Sa remarque envieuse à propos du concert de Jay-Z la veille, et son attaque envers Beyonce. Le guitariste un peu fou. Popol et sa trompette, le concours entre lui et Beth. La petite brune à l’esprit enfantin qui descend de scène pour s’accaparer de l’instrument et s’amuser quelques secondes. Son énergie communicative, et Standing in the way of control qui remue la foule.

Me frayer au premier rang pendant que Steph se recule un peu. The Hives. Les lettres rouges en fond de scène. Les costumes noir et blanc et les cravates rayées. L’incontrôlable folie qui monte en moi et autour de moi, malgré les fines gouttes de pluie. La prétention ajustée de Pelle, la pluie qui lui fait tomber la veste, les cris qu’il nous fait pousser, et les grimaces de son frère à notre encontre. Les tubes qui font leur effet et l’hystérie collective qui tombe juste. Leur jeu de scène incroyablement excitant, leur humour particulier et un immense plaisir qui ressortent de tout ça. Des micros, guitares et baguettes qui volent, le suédois Jaggerien qui saute et court partout, provoque la foule, bondit dans le public, et puis sa main contre la mienne et son visage à quelques centimètres. Leurs aux-revoir et la promesse personnelle de les revoir au plus vite.

Reculer pour la suite. Un petit tour pendant la pause. Les filles de Toyota que l’on croise, et un autocollant PARTICIPATE sur chacun de nos ponchos. Et puis Editors et toujours la pluie. Le visage sur l’écran géant qui m’en rappelle un ancien. Les mains sur le piano et la voix unique. Les oreilles plongées dans leur univers et les yeux distraits. Le lancer de papier toilette et les tonnes de gobelets empilés.

Trainer Steph jusqu’à la plateforme de la Pyramid pour Kate Nash. Echos de King of Leon qui ne donnent pas tellement envie d’aller jeter une oreille. La jolie anglaise qui charme la foule. Son allure de poupée, ses taches de rousseurs, ses yeux malicieux et son sourire enchanteur. Le décor au style cabaret. Son petit air timide lorsqu’elle s’adresse à nous. Sa voix toute douce. Les mélodies mutines au piano. Son accent tranchant. Les paroles qui résonnent en moi. Nos cœurs conquis et les airs qui restent en tête des heures. And I’m singing "oh oh" on a Friday night...

Le soleil qui revient et notre retour au bord des arbres pour Ben Harper et ses Innocent Criminals. Sa classe innée. Ses longues mains qui gratouillent la guitare posée sur ses genoux, et les percussions qui résonnent. Les tons blues, funk et reggae qui s’enchaînent, les airs que l’on reconnait, et sa voix chaude qui nous berce. La rencontre avec Christian le belge d’Alerte à Malibu. Les toilettes VIP toutes propres et le papier blanc décoré de dessins.

Nouvelle avancée vers la scène. Steph qui reste en arrière, estomac oblige. Une place au second rang pour moi, en attendant que le premier rang se libère et que je pose mes mains sur la barrière. Sigur Ros à venir. Les boules lumineuses en fond de scène et les instruments magiques. Mes voisins de toutes nationalités qui font l’animation, et longues minutes d’attente qui passent plus vite. Nos échanges sur le groupe et l’excitation qui monte. Les frissons alors que la scène est encore vide. Et puis les anges qui apparaissent et les larmes qui perlent à mes yeux. Au centre, Jonsi et son aura féérique, sa veste sombre sanglée, les paillettes sur sa pommette droite et les plumes dans son cou. Orri derrière sa batterie, couronne multicolore posée sur la tête. Entre les deux, Goggi accompagnée de sa basse. Son costume élégant et sa prestance imperturbable. A l’autre bout, caché entre les multiples claviers et xylophones, Kjarri qui me tourne le dos. Et puis les quatre fées pastel d’Amiina et leurs instruments à cordes majestueux, et en bonus, des cuivres tout vêtus de blancs.
L’envol au pays des elfes avec Svefn-G-Englar. Jonsi qui nous envoute de sa voix cristalline, et celle plus grave de Kjarri qui lui répond. La guitare parsemée d’oiseaux brillants sur laquelle glisse l’archet. La dernière note sortie de sa bouche qui s’éternise, accompagné des effets de lumière. L’esprit d’Ágætis Byrjun qui reste intact avec Ny Batteri, et son intro qui fait la part belle aux lutins blancs de ce soir. Les lèvres de Jonsi au plus près des cordes et l’émotion sur son visage aux yeux fermés. La très attendue Glosoli et sa poésie unique qui s’étend au-dessus du public silencieux d’admiration. Saeglopur ensuite, et ses notes scintillantes comme des flocons de neige. Les morceaux du tout dernier album qui s’ajoutent petit à petit, et la surprise d’un Hafsol au milieu de tout ça. Orri qui s’attèle au xylophone le temps d’une chanson et Jonsi qui se rapproche de Goggi. La nuit qui tombe et les lumières qui n’ajoutent qu’encore plus à l’ambiance. Jonsi et l’autre guitare. Rouge. Toujours lui qui rejoint Kjarri derrière les claviers, et qui joue de ses cordes avec une baguette de batterie, une fois retrouvée sa guitare. L’heure qui touche presque à sa fin. Gobbledigook qui retentit, bouleversante, et les gros souffleurs repérés l’après-midi qui remplissent le ciel de blanc. Les petits papiers qui volent dans la faible lueur du crépuscule et retombent en pluie sur la foule émerveillée. Le rappel sur Popplagid qui nous achève de beauté et que l’on voudrait ne jamais voir se terminer. Et puis les instruments qui se taisent, leur avancée à tous sur la scène, et leurs saluts face aux applaudissements d’un public qui ne réalise pas encore ce qu’il vient de vivre.
Leur sortie de scène, le rêve qui s’étiole en pointillés, et l’envie de m’écrouler sur le sol qui ne résiste qu’à l’idée de ceux qui vont suivre. Une heure passée dans un autre monde. L’impasse sur mes préférées qui finalement ne compte pas. Du sublime et de la magie qui flottent dans les airs, sur chaque morceau quel qu’il soit. Les larmes et les étincelles dans mes yeux tout le long. Le cœur qui se perce en mille endroits. A chaque note les frissons dans tout le corps. A chaque son l’envie de me mettre à genoux devant eux.

Radiohead. La mise en place du nouveau décor que je suis d’un œil distrait, l’esprit encore tourné vers la terre de glace. Les tubes transparents alignés au-dessus de la scène. Les techniciens qui grimpent à leur cime. Les écrans du fond et les trois micros en première ligne. Et puis, une fois la nuit noire complète, la scène qui se nimbe de bleu, et les cinq musiciens qui s’y plongent. Les caméras fixes braquées sur chacun d’eux, et leurs images sur les écrans découpés en six. Cette voix unique et émouvante qui nous transcende. Les trésors de ce monstre de groupe qui prennent vie devant nous. Les néons qui forment un halo mystique, tantôt bleu, rose, vert, rouge, ou violet. Des ambiances électroniques entremêlées d’explosions rock et d’acoustiques pénétrants. Les sons les plus planants qui embrument le cerveau. Les meilleurs morceaux du dernier album et de plus anciens embrasements. Lucky, There There, How To Disappear Completely, Jigsaw Falling Into Places, Optimistic, Just, et toutes les autres, qui font vibrer le cœur et la chair. Thom et ses yeux souvent fermés sur l’intimité de ses mots. Ses petits pas de danse et les gestes désarticulés de ses bras, au son de ses pairs. Et ses quelques sourires timides que l’on gardera précieusement en tête. La simplicité de reflets blancs pendant leur première absence. Leur retour pour Videotape. La petite phrase de Thom qui rebondit à l’intérieur de mon crâne. This song is for people who hear voices in their head. Un peu plus tard, les néons qui se parent de multiples couleurs psychédéliques pour Paranoid Android. Puis le second et dernier rappel. Le piano décoré du drapeau tibétain et Thom qui prend place derrière. Everything In Its Right Place, pour finir de nous envoûter...

Et la redescente difficile.


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[ PHOTOS SIGUR ROS ]

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