jeudi 21 mai 2009

"YOU PUCKER UP OUR PASSION SPENT..."


La Musicale de Canal+ au Bikini, ou comment je me suis fait chier devant Placebo.
A Song To Say Goodbye, qu’il chantait, alors que juste en face, me passaient en tête toutes ses images de ma jeunesse, ces temps où ils comptaient, et ce qu’ils me faisaient ressentir à l’époque.

Mais reprenons du début.

Et le début, c’est lundi 11, la mise en vente des places, quelques jours seulement après l’annonce de l’évènement. Du rapide, quoi. Ghinzu et Placebo le même soir, dans une salle que j’aime, à 2h de chez moi, je saute sur l’occasion. J’avoue, j’avais beaucoup d’appréhensions quant à Placebo, le renouveau du groupe ne m’enchantant guère, et c’est Ghinzu qui m’a avant tout convaincu de faire le déplacement.

Dimanche matin, donc, train pour Toulouse. Grand soleil à mon arrivée, le chemin à métro puis celui à pieds dans Ramonville que je commence à bien connaître, et les alentours du Bikini... Déserts. Alors que j’imaginais les fans de Placebo campant là dès les premières heures du jour, les assimilant presque à certains campeurs déjà croisés dans le coin. Il faut croire que les fans Indochinois demeurent encore un peu un cas à part.

Les balances de Placebo, peu avant midi, et les répétitions de Battle For The Sun qui s’enchainent et qui esquissent malgré tout un petit sourire aux coins de mes lèvres ; la voix de Brian Molko restera toujours unique. L’arrivée de mes belges juste après ; le grand bus noir qui s’avance dans le parking, Maman qui tape le code du portail, ses chaussures vertes, et Greg tong aux pieds.

Et puis les heures qui filent, entre un sandwich englouti en vitesse, les têtes connues toulousaines qui débarquent, les coups d’œil à travers les vitres vers Ghinzu & Co en plein repas, les connaissances qui se tissent, les excursions à l’arrière de la salle, un Greg qui prend le soleil, une expédition toilettes qui nous mène vers les bateaux en réparation, et une autre vers divers buissons et bâtiments déserts. Des Schtroumpfs grignotés, trop d’Indochine à quelques mètres de nous, quelques airs de Ghinzu échappés de mon portable, les cartes qui font leur sortie, et plusieurs parties qui me verront Présidente. L’arrivée de Jeff, les discussions musicales, le jeune Steve qui passe à quelques mètres de nous, capuche sur la tête et mèche blonde qui dépasse, et puis Milie qui me rejoint.

Plusieurs fois, on nous annonce l’ouverture des portes pour 18h, ainsi que l’interdiction formelle de tout appareil photo. 18h passées de quelques courtes minutes, la barrière s’ouvre, fouille au corps et inspection minutieuse du sac, appareil non détecté qui passe, mais qui restera pourtant à mes pieds toute la soirée. Les doubles portes noires, le Bikini pour la troisième fois, et hop, mes mains sur la barrière, à gauche.

19h. The Jim Jones Revue. Et ça démarre fort. Les anglais sont déchainés dès les premières secondes, les instruments crachent leurs notes et électrisent la salle. Énormément d’énergie, groupe décalé et ambiance rétro originale, tant dans le son que dans le visuel. Look soigné au détail près, je remarque un scorpion dans la boucle de ceinture de Jim Jones. Le même qui, au milieu du set, nous invite à nous dévêtir ; manque de réaction dans le public, un peu pris au dépourvu. Je sautille sur place, ne voyant pas le temps passer malgré la forte attente des suivants. Coup de cœur pour le bassiste, et pour le clavier totalement déjanté. Bref, à revoir.

19h30, ils sortent de scène, et mes têtes connues s’affairent entre les néons, les amplis, les instruments et les tonnes de câbles, sans oublier les indispensables bières déposées par Maman. Je trépigne d’impatience. Et puis 20h approchent...

Ghinzu. Larmes aux yeux rien que de les voir arriver. Tout juste plus d’un mois que je les ai quitté, mais c’est dingue comme ils me manquaient, et l’effet que ça me fait de les retrouver. Sur scène, pour la première fois, Jean et Antoine ont également revêtu le costume noir symbolique du groupe. Mother Allegra ouvre le set, et comme à chaque fois je plonge à la première note. Des problèmes de son me froissent pourtant les oreilles, John en semble perturbé et se trompe magistralement dans les paroles. Le public me semble peu réceptif et l’ambiance générale un peu froide le temps des premiers morceaux. Je me sens un peu perdue au premier rang, seule à chanter, crier, sauter. Greg me fixe fredonner les paroles, un peu étonné. Mais les soucis techniques sont bien vite affaire classée, et après Cold Love mise de côté, Take It Easy prend ses droits, peu à peu le ton monte sur scène, et le public suit. Une fois de plus je n’arrive pas à retenir les larmes sur The Dragster Wave, émotions mêlées ce soir. Do You Read Me achève de convaincre les derniers réticents et les plus calmes, la salle s’enflamme et restera chauffée à bloc pour les morceaux suivants, dont un Chocolate Tube inconnu mais électrisant. Je suis fière d’eux, à ce moment-là. Même si dans l’ensemble, je les ai trouvés plutôt calmes et raisonnables, ne pouvant et n’osant sans doute pas se lâcher autant que face à leur public. Notons tout de même l’aventure de Greg sur les bords de la scène, envahis des divers câbles électriques, manquant de plonger vers nous, pendant que Kill the Surfers me ramène à Marseille. Et les belges nous quittent sur mes souvenirs.

Les setlists trempées et chiffonnées sont distribuées au hasard des premiers rangs, je me démène alors avec les roadies anglais pour récupérer la dernière, aidée du vigile en face de moi. C’est finalement Maman qui arrive et la détache avec soin, avant de me la tendre dans un sourire.

Longue attente avant les derniers de la soirée, on discute avec nos voisins, et les très sympathiques vigiles comme on n’en voit que trop rarement ; anecdotes de concerts, souvenirs positifs ou négatifs sur tel ou tel artiste, et divers avis sur les groupes de la soirée. Pendant ce temps, le décor a changé, et le micro Molkien se dresse à un mètre de moi.

21h15, le noir se fait, excitant la salle qui pour la grande majorité n’attendait que Placebo depuis le début. J’aperçois rapidement le visage de Stefan se détacher dans l’unique lumière des backstage, et quelques secondes plus tard, Bill, le jeune Steve, les nouveaux Nick et Fiona, et enfin, petit Brian suivi de grand Stef gagnent la scène pour entamer Kitty Litter, sous les applaudissements enjoués du public. La plupart des morceaux du prochain album nous sont présentés, agrémentés des quelques tubes habituels, tels que Special K ou Song To Say Goodbye. Au fond de la scène, un écran tout en largeur, mais bien trop bas pour y voir clairement, je n’y lirai rapidement qu’un GAME OVER. J’observe le jeune Steve avec beaucoup d’attention ; étrange sensation de le voir derrière les futs, à la place de son homonyme brun dont le sourire me manque. Il joue fort, très fort, avec beaucoup de fougue et d’empressement. Ça me faisait peur, mais finalement ça me plait, surtout sur les anciens morceaux, surtout sur Black-Eyed. Il n’y a que sur la douce Follow The Cops Back Home que son jeu me dérangera, dénaturant trop la chanson pour moi. Fiona, qu’on n’entend que très peu, alterne entre violons et divers instruments mais se retrouve souvent mains vides en attente ; elle remontera dans mon estime à la fin, avec son thérémine. Bill se fait discret, entre guitare et claviers, presque caché au fond de la scène, et le nouveau Nick me laisse plutôt une mauvaise impression. Stef, lui, reste étonnamment très réservé tout au long du concert, quant à Brian, c’est étrange de le voir d’aussi près. Il a pris un coup de vieux et bat le record du monde du nombre de grimaces en une minute lorsqu’il chante, mais il est souriant comme jamais et s’adresse même à nous à de multiples reprises, s’approchant même du bord de la scène deux ou trois fois.

J’aurai un coup de cœur pendant une intro où Brian et Stef se retrouvent à jouer face à face en se regardant, et je garde imprimées en tête quelques images empreintes de nostalgie, comme le regard de Brian croisant le mien à plusieurs reprises, ou son jeu de guitare mémorable. Mais leur set est loin de me convaincre, les nouveaux morceaux de m’emballer, et leur présence scénique de me suffire. Je m’ennuie et n’arrive pas à rentrer dans le concert. Brian se trouve à un mètre seulement, presque à portée de bras, et pourtant j’ai cette désagréable impression de ne pas voir Placebo en face de moi. Ce n’est peut-être pas totalement de leur faute, j’ai encore la tête en partie avec Ghinzu, et un certain esprit de jugement avec lequel je suis venue. Ils m’ont déçu, plusieurs fois, sur scène, mais jamais encore ils ne m’avaient autant empli de vide. Leur show très pro, trop carré, sans surprise et sans aucune prise de risque, me donnera même plusieurs fois envie d’aller finir le concert au fond de la salle. Je résiste et reste, espérant le déclic, de ma part ou bien du leur, mais je finis le concert en applaudissant seulement par politesse. Une fois tout le monde sorti de scène, le jeune Steve lance ses baguettes au milieu de la salle, s’approche du public et serre quelques mains avec un grand sourire, faisant naitre en moi un faible espoir, celui de le voir déteindre sur le reste du groupe, et de leur apporter le grain de folie qu’il leur manque.


Ghinzu : Mother Allegra / Mirror Mirror / Dream Maker / Cold Love / Take It Easy / The Dragster Wave / 21st Century Crooners / Do You Read Me? / Chocolate Tube / Kill The Surfers.

Placebo : Kitty Litter / Ashtray Heart / Battle For The Sun / For What It’s Worth / Black-Eyed / Speak In Tongues / Follow The Cops Back Home / Every You Every Me / Special Needs / The Never-ending Why / Happy You’re Gone / Special K / Song To Say Goodbye // Infra Red / The Bitter End // Taste In Men.

mercredi 13 mai 2009

VLADIMIR NABOKOV, LOLITA.

« Quand je me retourne vers le passé, les mois et les années de ma jeunesse semblent filer au vent du souvenir, errant en une nuée de lambeaux identiques et pâles, telles ces tempêtes matinales de papiers chiffonnés que le voyageur voit tourbillonner dans le sillage du train. »

« Je parcourus un trottoir ombré de bleu en épiant l’autre, qui était métamorphosé féériquement par la lumière du matin – un de ces jeunes matins d’été, tendre et presque fiable, avec çà et là des reflets de verre, et qui semblait flageoler, comme près de défaillir devant la perspective imminente de la chaleur intolérable de midi. »

« ... je la regardais et la regardais encore, et je savais, aussi clairement que je sais que je dois mourir, que je l’aimais plus que tout ce que j’avais vu ou imaginé en ce monde, ou espéré dans l’autre. Elle n’était plus que l’infime odeur de violette – un écho bruissant sous les feuilles mortes – de la nymphette d’antan, sur qui je m’étais roulé en rugissant ma joie ; un écho au bord d’un abîme mordoré, avec une forêt lointaine sous le ciel blanc, et un ruisseau étouffé par des feuilles brunies, et un dernier grillon dans les hautes herbes sèches... Grâce à Dieu, ce n’était point seulement cet écho que j’adorais. Ce que je choyais naguère, parmi les sarments tortueux de mon cœur – mon grand péché radieux – s’était réduit à son essence : le reste, la lubricité égoïste et stérile, tout cela était aboli, maudit. Vous pouvez me couvrir d’injures, menacer de faire évacuer la salle – tant que je ne serai pas étranglé par vos bâillons, je crierai ma pauvre vérité. L’univers saura combien j’aimais Lolita, cette Lolita, blême et polluée, et grosse de l’enfant d’un autre, mais toujours la même – avec les mêmes yeux gris, les mêmes cils fuligineux, les mêmes harmonies châtain et amande amère – oui, la même Carmencita, mienne, mienne à jamais ! »

« Je couvris mon visage des deux mains et fondis en larmes – les larmes les plus brûlantes que j’aie jamais versées. Je les sentais ruisseler entre mes doigts et le long de mon menton, et me suffoquer – mes narines étaient obstruées, je ne pouvais me maîtriser, et soudain, elle me frôla le poignet.
″Je vais mourir si tu me touches″, dis-je. »

mardi 12 mai 2009

"COMBUSTIBLE TEARS, DESTRUCTIBLE FEARS."


Un mois pour essayer de l’écrire. De nombreuses tentatives vaines, des essais avortés. Les souvenirs qui se mêlent et les mots au bout des doigts qui deviennent confus. Alors... Chut.

Une longue semaine d’avril 2009. Un dépaysement belge en quatre étapes françaises. Un marathon majoritairement improvisé et rempli de surprises.

Des tas de souvenirs à ranger là-haut, derrière une porte fermée à double tour. Pas pour oublier, loin de là. Juste pour conserver tout ça égoïstement, pour ne pas en perdre une miette, pour ne pas éparpiller ces paillettes n’importe où.

Des mots-clefs qui ricochent sur les murs, entremêlés de quelques noms propres. Des images collées à jamais sur le papier peint. Leurs voix et leurs mots qui résonnent au centre de la pièce. Leur musique soufflant sur les rideaux.

GHINZU.