mercredi 22 octobre 2008

"YOU’VE GOT TO GO STRAIGHT AHEAD !"


Mes retrouvailles avec The Kills dimanche dernier.

La longue file d’attente le long du mur. Le public jeune parsemé de nombreuses mèches. Me faufiler au milieu de la foule. Le hall, mon billet déchiré en deux, les doubles portes, et le milieu du deuxième rang. La salle qui se remplit lentement. Les t-shirts accrochés au mur sur la gauche. Les techniciens sur la scène, les instruments, les câbles, et le décor de la première partie. Les chansons d’attente en léger fond sonore.

Un trio coloré qui envahit la scène en courant. Des fringues teintés années 80 et les premières secondes qui surprennent. Un son électro-pop associé à un chant plutôt rappé à l’ambiance californienne, soutenus par des chorégraphies... décalées. Chanteur au pull bariolé, pile électrique exagérée qui saute, court, danse et adresse au public des expressions insolites. Le guitariste chevelu à droite, entre discrétion et allures de guitar-hero. A gauche, les mains du troisième qui guident les keyboards, ornés de paille et du nom du groupe scintillant. Quelques bras qui s'agitent dans le public, mais l'ensemble qui reste bien sceptique.

La foule surchauffée qui n’attend plus que le duo vibrant qui respire le Sex, Drugs & Rock’n’roll. Les serviettes blanches et les setlists. Les bières et autres boissons suspectes déposées ici et là.

Leurs silhouettes qui apparaissent en contrebas de la scène, les cris hystériques et les lumières qui s’éteignent.

Leur charisme phénoménal qui remplit la salle en une seconde, et U.R.A. Fever comme intro sans détour.

VV. Légendaire slim noir qu’elle porte mieux que personne. Bottes dorées aux pieds. Long t-shirt informe troué et chemise léopard sortie du clip de Last Days of Magic. Etole autour du cou, accompagnant ses colliers et sa patte de lapin rose.

Hotel, son jean et son t-shirt moulant. Ses bottes de cuir, et son foulard tacheté assorti à la petite chemise de VV.

Leurs corps qui transpirent le sexe par chaque pore. La musique qui les habite au plus profond. Les instruments qui les possèdent. Chaque note qui en devient transcendante.

La boite à rythme qui fait trembler les tympans. Le son sale et saturé qui remue les tripes. La majestueuse guitare rouge de VV maniée comme une partie d’elle. Hotel qui n’hésite pas à martyriser la sienne, frappant le bois et tendant les cordes à l’extrême, à l’en faire crier et sortir des sons électrisants.

Le regard animal de VV envers Hotel. Son jeu à lui avec le public, se penchant plusieurs fois au-dessus de nous. L’instrument dans ses mains, les à-coups qu’il donne et la tension sexuelle palpable. Ses petits pas de moonwalk latéral, ses pieds qui glissent sur le sol. VV qui s'effondre parfois sur la scène. Son charme dévastateur. Les clopes qu’ils s’échangent. Leurs micros face à face, leurs regards, leurs gestes et leurs sourires. Lui parfois à ses pieds. La communion unique de leurs deux âmes.

Les 3 albums qui se répondent. Les chansons les plus électriques qui alternent avec les plus intimistes. Les perles de sueur sur tous les corps. Les frissons sur toutes les peaux.

VV à quelques centimètres de mon visage, et son regard brûlant qui se plonge quelques secondes dans mes yeux, me faisant oublier qui je suis.

Le temps et les chansons qui filent à une allure folle. La douce Goodnight Bad Morning qui apaise la foule et suspend le temps quelques secondes. Leur sortie de scène, l’hystérie dans la salle, les centaines de cris et les pieds qui martèlent le sol. Les chapeaux melon sur leurs têtes pour le rappel, et une reprise du Velvet Underground. Les paumes de nos mains qui frappent pour Sour Cherry, et le final inattendu sur Dropout Boogie. Hotel juste devant moi et mes mains sur les cordes vibrantes.

Orgasmique.


URA Fever / Pull a U / Tape Song / No Wow / Alphabet Pony / Last Day of Magic / Kissy Kissy / Black Balloon / Hook and Line / Getting Down / Cheap and Cheerful / Fried my Little Brains / Goodnight Bad Morning // Pale Blue Eyes / Sour Cherry / Dropout Boogie.


[ photos ]

jeudi 16 octobre 2008

GENEVIEVE BRISAC, VOIR LES JARDINS DE BABYLONE.

« Aimer est un mauvais sort comme ceux qu’il y a dans les contes, contre quoi on ne peut rien jusqu’à ce que l’enchantement ait cessé. (Marcel Proust) »

« …de minuscules nuages filent sans savoir qu’il suffit de les accrocher du regard pour reprendre espoir. »

« Ça ne me va pas. Rien. Ça n’ira jamais. Impression d’aller à l’abattoir. Sentir son sand refroidir et sécher, l’énergie disparaitre. Une faiblesse et une tristesse extrêmes… Les neufs filles du dortoir rient et elles bougent. De regarder leurs bras nus, je me transofmr en brindille. Plus elles rient, plus je me sens étrangère. Pas le genre émouvant et poétique, le genre puant et ridicule. Petite transpiration sèche de cloporte. On dansera peut-être des slows, et comment ferai-je pour éviter qu’on s’aperçoive du coton dans mon soutien-gorge, de mes mains qui tremblent, personne de toute façon ne saurait m’inviter à danser, me dis-je pour me rassurer. Ensuite, plus tard, assise dans le noir, condamnée à ma peine, souris morte, écoutant vaguement le disque qui repasse sans arrêt, Strangers in the night, mais je ne sais pas écouter la musique. Révoltée enfin que personne, aucun garçon n’aperçoive mon âme bondissante et joueuse, mon cœur tendre, sous ma peau verte. Mes yeux noirs, otchi tchornoie, qui sont les fenêtres de mon âme prisonnière.

« Et j’ai emporté l’enfant dans une valse d’intérieur qui nous a fait fondre le cœur.
Il avait ce regard concentré et confiant qui est l’amour même et qu’on oublie tout le temps. Qu’on oublie d’avoir, qu’on oublie de voir. Dont les jeunes filles essaient de se souvenir en battant des cils, tragique contresens. »

« Le monde est un théatre, chacun tente de donner de la voix, d’être celui qui raconte l’histoire, toutes ces voix qui se donnent en même temps, cacophonie sacrée de notre désir d’être compris, que, simplement, notre version soit entendue. »

« Comme on attend le facteur le matin. Comme on ouvre avec précaution et le cœur battant la boîte aux lettres. Dans l’espoir de cette fameuse surprise qui ne vient jamais, de ce “Je vous aime“ inconnu et qui apaiserait le cœur. »

« Comme notre vie est déjà longue, pensé-je avec stupeur, en détaillant les boîtes de gâteaux en fer-blanc peintes, les morceaux de bois aux formes indécises ramassés sur des plages, les matriochkas et les masques indiens. Que reste-t-il de nos flots de paroles, de ces kilomètres d’heures passées ensemble à donner des contours flous et bariolés au monde dont nous rêvons, à tenter de comprendre qui nous sommes ? »