jeudi 16 septembre 2004



Mardi 14 septembre 2004. 18h, gare d’Avignon centre. Ter Avignon-Bézier. Pas mal de monde. Deux sièges de libre, près de la porte. Un coin du siège semble avec été brûlé. Une fille arborant un T-shirt Manson entre dans la même voiture. 18h06, départ. Ciel gris. Dans ma besace, Silverchair, Indochine, Colour Of Fire. Dans mes oreilles, Saez. Encore. Devant mes yeux, les dernières pages de mon livre du moment. Arrêts à de multiples petites gares. Quelques personnes descendent à chaque fois. Très peu montent. Ciel de plus en plus sombre. La nuit commence à tomber. La pluie de même. Fin du livre. Pensées qui vagabondent, un peu dans toutes les directions. Mais surtout là où il ne faut pas. Coins des yeux humides. Milhaud, Vergèze-Codognan, Lunel. Quelques noms de villes, parmi d’autres déjà oubliés. Un peu plus de 19h20, Montpellier. Descente de la majorité des voyageurs. Immenses flaques dans la gare, pourtant bien abritée. Ça doit tomber, dehors. En effet. Pluie à torrent. Des grondements, et même quelques éclairs, en prime. Le tram me passe devant. Tant pis. Pas envie de courir pour l’attraper, surtout avec mon grand sac. L’arrêt de tram de la gare, un peu à l’abri, mais très humide. De toute façon, je suis déjà trempée. Tram suivant, je monte. Pas de siège de libre, ni envie de m’asseoir. Je m’adosse à la vitre. Quelques arrêts. Le mien n’est pas avant un bon quart d’heure. J’ose quelques coups d’oeil, autour de moi. Une adolescente, son sac à dos est équipée d’une fermeture éclair, jaune presque fluo, à énormes crans. J’adore. Une jeune femme en sandales. Un trentenaire, son parapluie s’égoutte sur le sol. Je regarde les perles d’eau tomber. Deux vieilles dames s’accrochent. Un refrain tant entendu résonne dans ma tête. ‘Aies du respect pour les vieilles personnes’. Je pensais stupidement qu’elles en avaient aussi entre elles. Je m’étais trompée. En face de moi, mon reflet tremblant. Silhouette floue, visage absent. Un semblant de fantôme. Assis un peu plus vers l’avant, je reconnais un étudiant. Nous étions ensemble, en médecine, l’année dernière. Son ‘bonnet Jamaïquain’ -je ne sais pas comment on appelle ça- cachant ses dreads, ses fringues vert kaki, son visage fin, ses grands yeux. Je ne lui ai jamais parlé. Mais le voyais souvent, en cours, ou dans le tram. Simple visage connu. Simple inconnu. Mon arrêt. 300 mètres sous la pluie, encore plus forte. A moins que ce ne soit une impression. Je passe dans les flaques impossibles à éviter, sous des arbres impossibles à contourner. Ou presque. Mais ça sonne bien, comme cela. Arrivée dans l’accueil, quelques secondes de sec. Puis, re-pluie. Nouvelles flaques, nouveaux arbres. Mon bâtiment. Montée des escaliers, 2 étages. Enfin, j’arrive. Ma clef dans la serrure résonne dans le couloir calme. Chaussures, pantalon, veste, sacs humides. Je me change. Des gouttes d’eau descendent des mes cheveux, sur mes épaules, ma nuque, mon dos. Je branche ma nouvelle antenne TV. Et la laisse, la TV, allumée. Histoire de ne pas retrouver le silence tout de suite. Un reportage sur je-ne-sais-quoi, à Cholet. Tiens, Cholet. Sourire. Il faudra, un de ces jours, que j’ose lui demander sa nouvelle adresse, à Ben. Même si ça ne presse absolument pas. Même si ça n’a aucune importance. Vu ce que j’en ferai... Je range mes affaires. Je sors mon carnet de mon sac. Pas une trace d’humidité. Bien que ma besace ne soit pas imperméabilisée. Je tourne quelques pages noircies. Une page vierge. Stylo à la main. Des tas de toutes petites choses à écrire. "Mardi 14 septembre 2004. 18h, gare..."

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